samedi 8 novembre 2008

l'amère


Mon petit, tout petit comme une goutte entre mes doigts. Je te lècherais pour te garder en moi, petite goutte d’encre ancrée dans le ventre de ta maman. Mon Amour. Mon Beau. Mon roi. Enfin je vais pouvoir vivre, je t’ai tant attendue. Je te serrerai, t’embrasserai les pieds, je te mangerai le nez en croquant tes sourires rieurs et à jamais tu resteras mien. Si un jour la vie t’éloigne de moi, n’oubli jamais que tu viens de mes entrailles et qu’il fallu une tenaille pour t’en arracher. Je ne veux pas que tu fleurisses, que les gens puissent te voir, et t’enlever à moi. Reste un petit bourgeon, petit poupon empaqueté dans tes langes, un ange apeuré. Aporie amère de mon devoir de mère. Je te dévore d’amour, mon ardeur ardente te consume. Mais ne vois tu pas comme je t’aime ? Cet amour charnier vient de ma chair. Je ne veux pas que tu t’arraches au sein maternel. Tète ! Tète ta petite tête collée à ma chair. Je t’enlève du monde pour t’élever, je te lèche et t’allaite et personne ne pourra te défaire de moi, tu m’es lié, je t’encorde à mon sort. S’en sortir à deux pour se sauver. Je t’emmène loin de ce monde dans l’onde de lumière où nous irons voguer sur des océans de chimères. J’imagine une lande où nous serons toi et moi dans une brume de crépuscule. Nous irons nous coucher sous le noyer, bercé par son ombrage, couvert de sa ramée et nos deux corps arrimés seront suturés d’une étreinte. Je recoudrai les plaies que je te ferai.
Maintenant je suis en deuil de ce petit bourgeon. Je te réclame des catacombes de la tombe.
Un zeste amère et pas éternel, amours incessantes tueuses, amours tués, amours tues.
Chut ! Chute ? …

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